Le projet
Le très innovateur Centre de recherche sur l’interdisciplinarité et l’interculturalité (CRII), de l’Université Omar Bongo de Libreville (Gabon), regroupe un nombre croissant de chercheurs d’un type nouveau parce que désireux de travailler en équipe multidisciplinaire: tous s’aventurent au-delà de leur niche spécialisée pour naviguer à la découverte de l’Autre savoir et pour co-construire la science en collaboration avec les autres disciplines. En cela, sa philosophie rompt avec une lourde tradition de recherche, encore très forte en France et en Europe : celle d’une production de connaissance faite sur le seul mode dominant du fordisme universitaire.
L’interdisciplinarité n’est pas pour autant supérieure à la disciplinarité, elle lui est d’égale valeur et complémentaire. Ce mode alternatif suppose un dialogue respectueux entre cultures disciplinaires différentes, mais aussi une mise en commun solidaire des acquis de connaissance respectifs comme autant d’instruments ou de ressources potentiellement utiles dans l’atteinte d’objectifs collectifs tels que: •la lutte contre le réchauffement de la planète; •la quête de réponses aux crises climatiques et humanitaires;• la recherche de solutions aux problèmes migratoires et aux violences de guerre; •etc. Jadis objet de réflexion philosophique, l’interdisciplinarité devient aujourd’hui nouvelle philosophie de la connaissance (1). Ainsi, les relations entre cultures de savoir deviennent occasion d’émergence d’une nouvelle philosophie politique des relations entre différentes cultures disciplinaires ou de savoir différentes, entre épistémologies endogènes de continents ou de peuples différents, etc. (2)
En tant que forme d’interculturalité, l’interdisciplinarité est marquée par toutes les difficultés classiques de cette dernière (violences coloniales, guerres de territoire, stéréotypes et préjugés, malentendus) et elle est tout autant porteuse de ses promesses d’innovation, de soutien à la création et d’enrichissement mutuel. Elle refuse péremptoirement toute position de surplomb de l’un des partenaires sur l’autre, l’horizontalité des échanges étant condition sine qua non de l’échange gagnant-gagnant. (2)
Puisque pour simplement continuer d’exister, notre monde se doit en urgence d’enseigner aux jeunes générations les voies du dialogue interculturel positif, mieux comprendre et pratiquer l’interdisciplinarité tout autant que réfléchir aux façons de concrétiser une interculturalité paisible constitue une voie d’espoir sur laquelle repose tout entier le CRII. Fruit d’un rapprochement de chercheurs de formation et de cultures universitaires éloignées, il est gage d’une recherche d’avant-garde dont les retombées débordent largement le continent africain pour fédérer les chercheurs interdisciplinaires de tous les pays du monde et profiter à l’ensemble des peuples concernés par le vivre ensemble.
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- Sur ce thème, voir par exemple Jean-Baptiste Vuillerod : https://aoc.media/opinion/2019/06/17/la-philosophie-et-ses-dehors-interdisciplinarite-et-decloisonnement-des-pratiques/
- Ainsi le très interdisciplinaire premier congrès international du CAMÈS, qui eut lieu en décembre 2022 à Libreville, fut-il le lieu de l’adoption de la Déclaration de Libreville sur l’égale dignité en potentialité savante des savoirs endogènes de tous les continents et de tous les peuples.
Ce contenu a été mis à jour le 28 février 2023 à 20 h 31 min.